À l’époque du fameux « NON », vers 2-3 ans, le petit bonhomme ou la petite bonne femme est dans le développement de son affirmation de soi et de son autonomie. Systématiquement, l’enfant refuse de manger, quand on lui propose, ou ce qu’on lui cuisine… Sa capacité à dire non est en effet sa liberté légitime, mais lorsqu’elle tourne à l’automatisme quotidien, il peut être temps de lui rappeler que son autorité intérieure n’est pas une toute puissance sur le parent, voire sur le foyer tout entier.
L’illusion de toute puissance étant l’autre face de l’impuissance, il est bon pour lui de dire à l’enfant que son droit à dire non est possible mais n’est ni absolu, ni inconditionnel. Ainsi, limitant le fantasme naturel de toute puissance, cela réduira chez l’enfant des phases de désespoir, de découragement et de toute impuissance face à des activités à réaliser seul, parfois encore trop difficiles pour lui. En rencontrant la frustration des limites, l’enfant apprivoise sa puissance et sa vulnérabilité, il développe sa persévérance, sa résilience personnelle, ainsi que son écoute de l’autre, sa socialisation et sa confiance.
Alors la prochaine fois que votre enfant refuse catégoriquement de manger, pour la énième fois, lors du repas suivant, mettez donc le couvert pour tous, sauf pour lui, en l’ayant compris dans la préparation du repas bien-sûr. Passez à table sans rien dire et voyez donc comment il va oser nommer son besoin voire, mieux, son envie de manger, comme un grand.
Ainsi, il prendra symboliquement sa place, non pas contre vous, mais pour lui, avec les personnes présentes. Vous pouvez lui rappeler avec un ton sécurisant que ce n’est pas lui qui décide seul et l’encourager à prendre soin de lui et de son corps en mangeant.
NB : Il ne s’agit pas d’un épisode isolé où l’enfant n’aime pas un aliment ou n’a pas faim, mais bel et bien une situation répétitive où l’enfant refuse de manger par lui-même à chaque repas, il ne s’agit donc pas de le forcer !
Ici, l’enfant prend sa place, s’affirme positivement (autorité intérieure) et l’adulte confirme sa place, sans l’humilier (autorité extérieure). Se crée alors une cohérence pour l’enfant entre son autorité intérieure et extérieure, il prend de l’assurance et nourrit l’estime qu’il a de lui-même dans un cadre sécure. Plus l’affirmation se consolide à travers le plaisir de manger, le lien entre la bouche et les gestes des mains, plus le « je » de l’enfant et sa parole sont créatifs et inventifs.
Dr Céline Choquet